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Le pouvoir de la maquette de couverture (ou comment elle peut tout ruiner)

La couverture d’un roman, disions-nous donc par ici, c’est super important. On peut très facilement penser qu’une belle illustration suffit pour obtenir la couverture parfaite.

Spoiler : que nenni.

Une couverture, ça se compose de deux “parties”, à savoir 1- l’illustration et 2- la maquette, qui regroupe tous les éléments graphiques autres que l’illustration. C’est-à-dire le titre, le nom de l’auteur, le logo de la maison d’édition, etc.

Dans l’idéal, ces deux parties devraient être considérées avec un soin égal et, surtout, réfléchies en parallèle, l’une par rapport à l’autre, afin d’obtenir une composition harmonieuse et lisible. En pratique, on a tendance à penser d’abord à l’illustration, puis à la maquette. On pense pouvoir s’en sortir avec une illustration magnifique qu’on aura payé une blinde auprès d’un illustrateur qu’on adore et une maquette faite maison alors que nos connaissances en graphisme sont de l’ordre du basique.

Re-spoiler : re-que nenni.

La mise en page d’une couverture, c’est encore plus important que l’illustration. 

. Parce qu’une mauvaise maquette peut complètement ruiner une couverture. À l’inverse, une maquette bien réalisée peut faire oublier la qualité moyenne d’une illustration et sauver l’ensemble.

En tant que graphiste et illustratrice, 80% de mon job dans l’édition consiste à réaliser des couvertures de roman complètes, illustration + maquette, mais je réalise parfois des maquettes à partir d’illustrations tierces. Dans ces cas-là, il arrive qu’elles soient 1- affreuses ou 2- non pensées comme des couvertures, et donc sans emplacement réservé pour le titre. 

Je ne vais pas m’amuser à prendre des exemples sur internet et ainsi pointer du doigt des gens qui n’ont rien demandé, alors on va en prendre un fictif, à partir d’une de mes illustrations personnelles qui n’a jamais été construite pour servir de couverture :

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Mettons celle-ci. Pas dégueulasse, pas forcément incroyable non plus, on va la qualifier de neutre : en l’état, c’est la maquette qui va donc décider du “caractère WOW” de la couverture.

Maintenant, voyons ce que donne une mise en page basique, comme on voit souvent (et particulièrement dans le milieu des indépendants et des petites maisons d’édition, qui n’ont pas forcément les moyens de se payer un professionnel) :

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“Ça va, ça pourrait être pire !” Effectivement. Tout est centré, les mots sont lisibles, la police du titre est basique mais pas laide (merci on a évité la Comic Sans MS) et ressort bien par rapport au reste. Ça passe.

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Ouais. Sauf que “ça passe”, quand on veut attirer le regard et vendre un livre, ça ne suffit pas. Je sais pas vous, mais perso je trouve cette couverture vieillotte, fade, pas pro. Les écritures ne vont pas avec le thème de l’image, bref, ça n’a pas spécialement de caractère.

On peut faire VACHEMENT MIEUX. Comment ?

Cinq conseils simples :

1- Privilégiez des typos modernes et un minimum originales. Oubliez direct (mais alors, direct) la Comic Sans MS, la Brush Script et autres typos système moches et dépassées. Même punition avec Papyrus, Chocolate Box and co, vues et revues. Idem avec toute la famille Arial, Times et Times New Roman : pour le texte en lui-même, pourquoi pas, mais sur une couverture, c’est d’un triste… Jetez un œil aux livres récents, regardez ce qui se fait : vous aurez une bonne idée des tendances actuelles.

2- Doucement quand même avec les typos fantaisistes. Prenez-en une, pour le titre par exemple (ça semble le plus indiqué) et laissez le reste (le nom de l’auteur et le titre du tome s’il y en a un) dans une écriture plus neutre. Tout simplement pour ne pas agresser l’œil et donner un effet fouillis.

3- Évitez d’utiliser plus de deux typos différentes. Une pour le titre, une pour le sous-titre/nom du tome, et c’est tout. Le nom de l’auteur et le sous-titre peuvent être dans la même écriture, ce n’est pas grave. C’est même mieux. Et si vous aimez vraiment toutes les typos au point que vous n’arrivez pas à vous décider… ben décidez-vous, demandez des avis, faites un tirage au sort avec des bonbons, mais tranchez et tenez-vous à cette règle des deux typos (sinon, mon prof de dernière année viendra vous découper le gras du cul, ça vous fera ça de moins à trimballer). Sans compter que, si le logo de la maison d’édition consiste à en écrire le nom dans une police définie, ça fera une troisième typo.

4- Pareil avec les couleurs : je sais que c’est tentant, mais il vaut mieux éviter de trop en mettre, voire d’en mettre plusieurs tout court. Des fois, la simplicité est largement plus efficace et élégante. Toutefois, évitez les noirs et blancs purs, trop austères, ainsi que les couleurs primaires, même si quelques exceptions peuvent être faites (si l’illustration est TRÈS colorée, un titre blanc peut attirer et reposer l’œil plus efficacement que si on ajoutait une couleur supplémentaire).

5- Enfin, petit conseil plus technique : hiérarchisez les mots du titre. Dans un titre tel que La Voie des Oracles, tous les mots n’ont pas la même importance. Vu sa longueur, il faut trouver un moyen de le faire rentrer tout en le mettant en valeur, sans le compresser. Pour ça, c’est tout simple : identifiez le ou les termes les plus importants — ici “Oracles”. Ce mot sera l’élément central autour duquel vous allez construire votre titre. Ensuite, prenez les mots les moins importants (“La” et “des”). Ceux-ci peuvent être plus petits. Quant aux autres, ils peuvent être d’une taille intermédiaire. Le but de cette mise en page est d’arriver à former un bloc qui tient dans une forme rectangulaire.

En appliquant ces conseils…

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Mieux, non ?

Ce que j’ai fait : • Réduire le nom de l’auteur, parce qu’à moins d’écrire des best-sellers, ce n’est pas l’argument de vente principal. • Remplacer le nom de la maison d’édition par son logo (au passage, ce sont les “éditions vite fait”, pas “bite fait”, hein. Mais c’est un parfait exemple d’un mauvais choix typographique)(et c’est drôle). • Changer le titre de place : le visage masqué par le voile suffit pour rendre une impression de mysticisme, les mains ne sont pas les plus importantes. Hop, on peut les cacher. Si l’illustration avait été pensée correctement, le cadrage aurait été différent afin que les mains restent visibles, mais on fait avec ce qu’on a. • Choisir une jolie typo pour le titre, en accord avec le thème de l’illustration. Celle-ci est payante (elle s’appelle Desire, si jamais), mais il en existe des 100% gratuites qui rendent tout aussi bien, pour peu qu’on passe un peu de temps à les travailler. • Hiérarchiser les mots et les placer de sorte à ce qu’ils “s’accrochent” aux autres : “La” est exactement aligné sur la lettre R, la fin de la première ligne est au même niveau que la fin de la deuxième. • Y ajouter une petite ombre portée pour qu’ils ressortent mieux, ainsi qu’un léger dégradé – très léger, afin de ne pas leur faire perdre leur impact.

Et voilà !

En conclusion : soignez aussi vos maquettes, pour l’amour des pâtes au fromage.

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